Mon nom de famille, c'est Olivier-Gariépy.
Et je me nomme Adriel Romeo.
Même si parfois, vous entendrez un ou deux malins s'amuser à m’appeler Ade, Rom ou Connard.

Si vous voulez tout savoir, j'ai 21 ans (26 juin 1991).
D'un point de vue physique, je fais 1,83 m et 91 kg.
Je suis passionné(e) par le journalisme, le sport en tout genre, les fêtes, la vodka et les femmes. Mais d'un autre côté, je dois avouer que j'ai une peur bleue que ma mère ne se réveille jamais.
Je suis célibataire.
J'ai également un demi-frère et une demi-soeur. Quant à mes parents, je n'ai jamais utilisé ce mot. Il y a ma mère, qui est actuellement dans le coma et à qui je pense tous les jours. Je l'adore... ou l'adorais. Elle a tout fait pour m'aider, elle m'a élevé seule. Et mon géniteur... sans commentaire. Il peut aller crever en Enfer.
Pour finir, je peux vous dire que j'étudie dans le domaine du Journalisme, option que j'ai choisie, être journaliste sportif, c'est mon rêve.

J'ai connu McGill ... Tout simplement parce que mon demi-frère Cédric y est allé. Elle est connue, elle est à Montréal: Flemme de chercher plus loin, que voulez-vous. Et j'ai décidé de m'y inscrire parce que ... L'université est pas mal et elle propose des cursus qui m'intéressent. En même temps, je peux continuer d’embêter mon frère, ça n'a pas de prix.

Et finalement, j'aimerais faire partie des Devil's Advocates. C'est la confrérie qui me convient le mieux actuellement. Je ne suis plus du tout comme avant. Je refuse l'autorité, je veux être libre, me défoncer si je le veux pour oublier la vie merdique qu'on m'a forcé à avoir. Peut-être que les choses auraient été différentes si j'étais resté avec ma mère, mais ce n'est pas le cas.

Quelques traits maladroits sur une feuille, le jeune garçon traça un rond surplombant un triangle. Il relia le bout de la ligne représentant son bras à un autre trait qui appartenait à un petit être de crayon, déjà dessiné. Glissant ses doigts autour du feutre marron, il colora les cheveux des deux têtes. Des points bleus pour les yeux, et un long trait courbé pour les faire sourire. Le petit brun souffla sur son papier pour balayer les résidus de gomme et l’éleva devant lui pour l’admirer dans sa totalité. Sous les deux personnages, on pouvait y lire en gros, dans une écriture peu assurée ‘Maman et moi’. Derrière le sourire fier du garçon, on devinait dans ses yeux une certaine tristesse. Il savait, au plus profond de lui, qu’il manquait quelque chose à ce beau portrait de famille. Regardant du coin de l’œil les feuilles de ses camarades, il se rendit bien compte que son dessin ne ressemblait pas à ceux des autres enfants, mais qu’importe, le sien était bien réussi. Il retourna son papier et y inscrivit son nom au dos : Adriel Olivier.

A chaque fin de journée d’école, on le retrouvait tout près du portail, emmitouflé dans son pull. Il patientait en observant les parents des autres, les emmener au chaud dans leurs grosses voitures. Il était toujours le dernier à attendre. Sa mère cumulait plusieurs emplois et finissait son service peu avant la fin des cours. Mais elle n’avait pas de quoi se payer une voiture et fonctionnait avec les transports en commun, pas toujours ponctuels. Son arrivée en face de l’établissement parvenait toutefois à réchauffer le petit Adriel avec son sourire lumineux. Charline Olivier était une jeune femme qui ne devait guère avoir plus de vingt-cinq ans. Elle avait renoncé à poursuivre ses études lorsqu’elle tomba enceinte et surtout, lorsqu’elle apprit que le père ne pouvait pas l’assumer. Il fallait dire, il était déjà marié et avait une vie bien établie à Montréal. Son épouse avait d’ailleurs donné naissance à un fils peu de temps avant. Il ne pouvait risquer de tout perdre pour une petite relation sans importance. Charline décida malgré tout de le garder et de l’élever seule sans rien lui demander. Adriel n’avait jamais posé de question et cela l’arrangeait bien. Ce n’était pas facile à dire à un enfant qu’il était né d’un adultère, que son père avait une autre famille, d’autres enfants à aimer et que lui, n’était personne.

D’un naturel sage et discret, il n’avait jamais eu l’habitude de faire parler de lui. Pas particulièrement brillant à l’école, Adriel était cependant très responsable et indépendant. Il apprenait rapidement à s’occuper de lui-même en l’absence de sa mère. Malheureusement, il ne savait pas que cela lui serait plus utile que prévu. Il avait presque quinze ans lorsqu’un accident terrible survint.

« Nous annonçons un accident de bus dans le quartier de Laval ce mardi matin. Alors que l’autocar s’engageait sur un rond-point, une voiture lui est rentrée dedans, forçant le chauffeur à effectuer une manœuvre qui provoqua le basculement du bus sur le côté. Nous dénombrons quatre morts, plusieurs blessés dont un grave qui se trouve actuellement à l’hôpital. Son pronostic vital serait engagé. La circulation reste bloquée pour l’instant, jusqu'à ce que les circonstances de l’accident soient totalement éclaircies... »

Adriel resserra ses doigts autour de la main de sa mère, allongée sur ce lit. D’un œil inquiet, il surveillait toujours les courbes de l’électrocardiogramme, tel un ange gardien. Après tout, Adriel en était un. Cela faisait deux semaines que Charline dormait aussi profondément, plongée dans un coma qui lui semblait interminable. Le jeune garçon lui murmurait des choses, lui adressait des prières. Il avait été confié aux services sociaux en attendant un éventuel réveil. Mais l’état de la mère semblant se prolongé. Il fallut prendre rapidement une décision pour l’enfant. Après plusieurs mois de procédures et un anniversaire passé au chevet de sa mère, il fut décrété qu’Adriel irait vivre chez son père biologique.

Il avait écarquillé grand les yeux, à la fois choqué et fou de rage. Comment osait-il se montrer après tant d’années ? Monsieur Gariépy avait appris ce qui était arrivé à Charline, cela l’avait profondément touché. Rongé par les remords, il prit la décision de réclamer ses droits et de reconnaitre son fils pour pouvoir le garder. Cela n’avait pas du être facile pour lui de l’annoncer à sa femme et à ses enfants. Mais il l’avait fait. Il ne devait pas être si mauvais. Cependant, Adriel ne voyait pas les choses comme ça et se promit de faire le maximum pour lui pourrir la vie. Il préférait vivre dans la rue que chez de parfaits inconnus. Mais on ne lui avait pas laissé le choix. Il débarqua quelques mois plus tard dans une grande maison, bien loin du petit appartement qu’il avait connu. Malgré tous les efforts de l’accueillante Madame Gariépy, le jeune homme ne lui accordait aucune confiance. Il ne parlait presque jamais et méprisait ses demi-frère et sœur. Ils avaient eu la chance qu’il n’avait pas eue. Ce n’était que des gosses pourris gâtés. Cédric et Delphine. Ces noms étaient amers dans la bouche du garçon.

Dès qu’il eu posé ses valises dans sa nouvelle chambre, sa vie changea du jour au lendemain. Nouvelle famille, nouvelle école, nouveaux amis. Il n’était plus le même. Il décréta que l’on devait désormais l’appeler Roméo. Il n’avait plus rien d’un ange et Roméo symbolisait d’une certaine façon, la guerre des familles dans la célèbre tragédie de Shakespeare. Il devint quelqu’un d’exécrable et d’arrogant. Il ne parlait à sa famille que pour leur lancer des piques et faire des sarcasmes. Même s’il ne le montre pas et ne le montrera sans doute jamais, il a apprit au fil du temps à les apprécier. Mais il est bien trop orgueilleux pour se l’avouer. Il a enfin trouvé la famille qui lui a toujours manqué, même s’il n’oublie pas sa mère, toujours dans le coma. C’est pour elle qu’il continue comme ça.
Son diplôme en poche, Romeo décida d’aller poursuivre ses études à McGill, la même université que son grand frère Cédric. Il fut admis pour le cursus de journalisme. Son rêve étant de devenir journaliste sportif. Il s’implique dans tous les clubs de sport de l’université et dans la radio étudiante, qu’il anime souvent. Devenu un fêtard invétéré, il était évident qu’il postule pour rentrer dans la confrérie des Devil’s Advocates.