cédric & elena ☀ première rencontre

- Vous aimez bien m'conf'ture, m'sieur ? Elle est tout fraiche, c'ma soeur qui l'a faite. A a cueilli des fraises dans son jardin, toute seule, comme une grande.

Tentant un sourire forcé, il se contentait d'écouter le vendeur de gauffres en croquant lentement dans la pate recouverte de cette fameuse confiture aux fraises. En soit, celle-ci n'était pas mauvaise, même s'il se serait bien passé du monologue plus que fatiguant du responsable du stande. Sa soeur, sa soeur ... Il avait qu'à le lui dire à elle, que sa confiture, elle était bonne ! En quoi ça le concernait, lui, Cédric Gariépy, si ces fraises venaient de la lune ou d'un bois non lointain ? Heureusement qu'il n'en avait pas demandé une au sirop d'érable : le récit l'ayant accompagnée aurait été davantage à dormir debout ! Il riait intérieurement en pensant au vendeur racontant comment son jeune neuveu avait pris sa propre hâche pour aller chercher la sève d'érable lui même, et comment sa soeur l'avait ensuite rangé dans ses petits pots ... Heureusement, il avait échappé à ça.

Néanmoins, le vendeur semblait fier de sa famille. Et en tant que bon québecois respectueux et fier de la sienne à lui, Cédric ne pouvait que comprendre le sentiment, et donc, feindre son intérêt et sa fascination quant à ses récits. D'ailleurs, il se demandait où la sienne se trouvait, en ce beau jour ensoleillé. Il pensait évidemment à sa soeur, Delphine ; pour ce qu'il en était de Romeo, il s'en contre fichait. Moins il voyait son affreuse frimousse brune, mieux il se portait ... Ce type était vraiment malcommode, il n'y avait pas d'autre mot. Il se rappellait encore du jour où il était arrivé chez eux ... Le jour où leur vie parfaite de famille prit malheureusement fin.

- Eh, m'sieur. Vous êtes là ? insista le vendeur. Clignant des yeux, il secoua alors la tête, une habitude il avait prit en grandissant, un peu pour chasser les rêveries et les pensées de sa tête lorsqu'il était en plein milieu de conversation. Certes. il n'était pas réellement dans une conversation, mais la moindre des politesses était au moins de faire semblant d'écouter.

- Hein ? Ah, oui, désolé, excusez moi. répondit-il alors en souriant chaleureuse. Cette confiture est vraiment délicieuse, votre soeur est très douée. continua-t-il alors. Vous devez être très fier d'elle.

Cependant, bien qu'il n'avait aucun problème à être respectueux et courtois, il était bien plus que réticent à endurer les récits du vendeur bien plus longtemps. Finissant de manger le dernier bout de gauffre qu'il lui restait, il interrompit ainsi l'homme avant qu'il ne puisse continuer à lui raconter sa magnifique vie, le saluant d'un signe de main, lui disant "Excusez-moi, mais je vais être en retard. On se reverra un autre jour !" avant de se diriger vers les scènes. Évidemment, c'était faux. Il n'avait des représentations à faire que le mardi, mercredi et vendredi, et son chapiteau pouvait bien se passer de sa présence en ce moment même. Mais ça, seul lui en était conscient. Non, ce qu'il cherchait, surtout, c'était Samantha. Avant, il ignorait qu'il était humainement possible d'être aussi obsédé par une personne ; il ignorait à quel point l'amour pouvait frapper fort. Mais depuis qu'il l'avait rencontrée elle, il éprouvait de la sympathie pour les héros des "rom-coms" américaines, alors qu'autrefois, ceux-ci ne lui inspiraient que des rires moqueurs.

Apercevant un éclat de cheveux blonds au loin, il se mit à sourire ; bien que la femme était de dos, il ne pouvait que la reconnaître. Samantha. Ce nom était capable de l'envoyer aux anges. S'approchant d'elle, il se faufila à travers la foule, bien déterminé à lui réclamer son baiser quotidien. Il manqua d'ailleurs, en cours de route, de se faire rentrer dedans par un homme d'âge moyen rendu aveugle par les feuilles de la gigantesque plante qu'il portait à bout de bras.

- Faites attention à où vous marchez ! dit-il fort, d'un ton légèrement inquiet. En tant que Soaring Dove, la sécurité était l'une des bases de son nouveau mode de vie.

Il était finalement arrivé derrière Samantha. Il s'apprêtait à enrouler ses mains autour de sa taille et à lui demander d'une voix grave s'il lui avait manqué, avant de s'apercevoir qu'elle n'était pas habillée du même style vestimentaire que sa belle. En effet, maintenant qu'il s'était rapproché d'elle, il pouvait voir avec plus de précision les vêtements qu'elle portait, ainsi que le fait que sa silhouette n'était point identique à celle de la blonde. Il était heureux de s'être rendu compte de sa gaffe avant d'avoir fait quelque chose de ridicule. Néanmoins, la question se posait : où se trouvait Samantha ?

Tapotant sur l'épaule de l'inconnue, il lui demanda alors :

- Excusez-moi, mademoiselle, vous n'avez pas vu une femme blonde à peu près de la même taille que vous ?


Ma couleur, c'est #99a300. (: